Un très mauvais jour...

Hier, mon renard et moi avons connu notre pire leçon d'obstacle depuis notre inscription à Botbonalec. Alors que nous avions appris, grâce à notre actuel moniteur, à apprécier cette discipline qui nous rebutait quelques mois auparavant, ce vendredi 10 novembre a été une catastrophe...

En préparation pour le concours de Malguénac, Vincent nous donne les mêmes chevaux, afin que l'on s'habitue à leur foulée, à leurs allures. Je monte Fiji depuis un an maintenant, et je la connais parfaitement. Même si on lui prête une réputation de ponette acariâtre, elle n'en demeure pas moins ma jument préférée, et une véritable histoire d'amour s'est tissée entre nous. Quand je vais la chercher au pré, elle dresse les oreilles vers moi. Elle m'accepte même à ses côtés quand elle somnole. Si je l'appelle, elle reconnaît ma voix et me regarde. Au pansage, elle fait sa chatouilleuse, mais elle me lèche, pose sa tête contre moi et ferme les yeux. Je lui gratte le poitrail et l'encolure, elle se dandine de plaisir puisque c'est son point faible... Quand je lui présente le mors à 10 centimètres de son nez, elle ouvre la bouche et attend que je le lui mette. Sous la selle, c'est presque de la télépathie... Si je lui fais faire un arrêt, elle restera immobile tant que mes jambes resteront fixes à la sangle. Si je décide de repartir au pas, il me suffit de bouger d'un millimètre pour qu'elle reprenne son allure normale.

Bref, une ponette fantastique, qui m'aime et que j'aime...

Mais hier, alors que nous allions chercher Pony et Fiji au pré, nous remarquons la présence d'Elixir avec elle. Un hongre alezan de 7 ans, stupide et apathique, dénué de personnalité, mais qui semble tout de même assez gentil. Pourquoi est-il ici ? Parce qu'une nouvelle ponette de catégorie D est arrivée la veille. Pour ne pas la stresser, on l'a laissée seule dans le pré d'Elixir pour qu'elle prenne ses premiers repères. Ainsi, l'alezan a atterri dans le champ de Pony et Fiji.

Nous entrons dans le pré, et alors que je m'approche de Fiji en lui parlant et en lui donnant mes petits surnoms affectueux, je la vois s'écarter de moi dès que j'approche le licol. Comme je refuse de forcer les chevaux, je prends mon temps avec elle, je la précède, je lui fais face. À un moment, elle tend le nez vers moi et nous nous reniflons mutuellement, à  la manière de deux chevaux. Ses yeux sont mi-clos, elle ne fuit pas mes caresses. Cependant, dès que le licol s'approche d'elle, la ponette s'écarte au trot, les oreilles couchées. Je la sais caractérielle, mais elle n'est pas du genre à rechigner quand nous devons travailler ensemble.

Aussi, ce manège qu'elle me fait au pré m'étonne. Mon Kitsune, qui d'ordinaire peine avec Pony pour l'attraper, n'a eu aucun problème cette fois-ci. Simplement, la ponette l'a regardée méchant, malgré l'entente parfaite entre  elles.

Enfin, nous parvenons à calmer Fiji pour "l'enfermer" entre Pony - la dominante des deux - et moi. Elle se laisse faire, mais il est évident qu'elle me suit par contrainte et cela me blesse un peu. Pour la détendre un peu, je la laisse brouter en longe quelques minutes [les prés de notre ferme équestres n'ont pas d'herbe, seulement de la terre]. Enfin, nous allons les attacher pour les préparer.

Au pansage, Fiji est assez distante encore, mais relativement gentille. Je remarque cependant que son passage de sangle est sale. Or le vendredi, je suis la première à la monter, et le jeudi, il n'y a pas de cours. Cette terre durcie sous son poitrail doit donc dater d'au moins mercredi. Là, j'apprends qu'effectivement, mercredi, une stagiaire a monté Fiji. Elle lui a écrasé le dos en tombant lourdement dans la selle, elle lui a cisaillé la bouche, lui a donné des ordres sans aucune coordination, donc incompréhensibles, et lui a flanqué des coups de talons dans le ventre [chose à ne jamais faire avec Fiji... elle est bien trop sensible]. Cette stagiaire vient d'ailleurs tourner autour de la ponette pendant que je la panse. La ponette plaque les oreilles en arrière. La fille les lui prend à pleines mains pour les redresser, sans se soucier de la sensibilité de ces organes sensoriels délicats.

En curant les sabots, je remarque que la terre accumulée dans les pieds de Fiji dépasse le niveau de ses fers. Inadmissible ! En curant de toutes mes forces, je constate qu'il y a à peu près cinq niveaux de crasse, dont une constituée du sable de la carrière... Depuis mercredi, elle n'a pas non plus été curée.

Une fois le pansage terminé [j'y ai passé 40 minutes tant il y avait à faire, et Fiji commençait à se détendre], j'apporte le harnachement. Heureusement que j'avais lavé le mors au préalable, car il était dans un état de saleté incroyable... Je selle la ponette, je lui présente le mors ; elle n'ouvre pas la bouche, contrairement à son habitude avec moi. Alors je glisse gentiment un doigt dans la bouche au niveau de la barre pour lui faire ouvrir la bouche. Elle rechigne quelques secondes, puis se laisse faire. Sincèrement, je m'inquiète sur son état, car ni moi ni Kitsune ne reconnaissons le caractère de Fiji. Elle n'est ni blessée, ni malade...

Je parle donc de ce comportement étrange à Virginie, la gérante du club ; apparemment, le comportement de la ponette s'explique par Elixir. Malgré son prétendu calme, il paraît que ce cheval est une véritable teigne au pré.

Vient la leçon d'obstacle... Une catastrophe. Fiji qui aime sauter ne prend aucun plaisir pendant le cours. Elle est tellement crispée que malgré moi, je ne parviens pas toujours à coller à la selle pendant le galop. Alors que pendant un an, je me suis faite à ses allures les plus variées, je ne la reconnais pas dans son galop.

Bref, une très mauvaise heure, où Fiji n'a pas été au meilleur de sa forme.

De retour après le cours, la fille de la gérante, âgée de 5 ans à peine, s'approche de Fiji. Elle veut lui embrasser le nez, la ponette menace de mordre. Quelques minutes plus tard, la gamine l'approche au niveau du flanc et la caresse. La jument lève son postérieur et vise sa tête. À 20cm, la petite y passait...

De son côté, quand elle a ramené Pony au pré, Kitsune a vu sa ponette l'embarquer... ce qu'elle n'avait jamais fait avant. C'est bien simple, Pony est une jument très calme au retour au champ à l'ordinaire. Quand on lui retire son licol, elle reste tranquille deux secondes avant de partir au pas vers le foin qu'on lui a préparé. Hier, elle a fait un écart et s'est ruée vers le foin.

Pendant toute notre heure de cours, alors qu'il n'était pas monté, Elixir a mangé dans les trois différents tas de foin qui avaient été donnés par les stagiaires.

Fiji était remontée après moi... Connaissant la cavalière qui allait la monter, si peu délicate dans ses mains et dans ses jambes, j'ai compris que cela n'arrangerait en rien le moral de ma petite pie noire adorée.

Résultat : je ressors de cette leçon avec un goût amer. J'ai l'impression de devoir repartir de zéro avec Fiji, alors que nous entretenions une relation privilégiée. Je commence même à me demander si ça vaut vraiment la peine que j'aille à ce concours à Malguénac. Si Elixir ne quitte pas le pré de Pony et Fiji dans la semaine, je ne sais pas à quoi m'attendre avec ma petite pie noire pour ce dimanche 19 novembre...

San/